La huitième édition de la Biennale de Lubumbashi, inaugurée le 24 octobre dernier, a choisi de se pencher sur la question de la toxicité sous toutes ses formes, notamment celle liée à l’exploitation minière, et son impact sur la population congolaise. Cette thématique a pour objectif de sensibiliser et d’attirer l’attention sur une réalité préoccupante.
Ce sujet a particulièrement inspiré Jenny Munyongamayi, artiste slameuse de Lubumbashi, qui a conçu une œuvre unique intitulée "Slam augmenté". Il s'agit d'une installation immersive tridimensionnelle, combinant son, images et textes. Les visiteurs sont plongés dans une expérience multisensorielle grâce à des casques audio suspendus au plafond, une projection vidéo sur les murs, et des textes affichés pour une meilleure compréhension.
« J’ai intégré ces trois éléments pour renforcer l’impact de l’œuvre. Les textes projetés touchent la réflexion, le son des casques suscite l’émotion, et la vidéo permet une synchronisation globale de l’expérience », a expliqué Jenny Munyongamayi à ACTUALITE.CD.
Cette installation, ouverte au public jusqu’au 30 novembre, marque une première expérience pour l’artiste dans le domaine des installations sonores et visuelles. Elle participe également pour la première fois en tant qu’artiste à la Biennale de Lubumbashi.
« Une première expérience comporte toujours des moments intenses, mais j’ai surtout vécu de beaux instants. De nombreux curieux sont venus découvrir l’œuvre et rencontrer son auteure. Cela valait la peine de présenter le slam sous une autre forme », a confié Jenny Munyongamayi.
Une démarche scientifique et engagée
Au-delà de la créativité artistique, Jenny Munyongamayi a mené un travail de terrain aussi bien scientifique que journalistique pour documenter l’impact de la toxicité minière. Elle s’est rendue dans les quartiers proches de l’entreprise minière Ruashi Mining pour observer les effets de cette activité sur les populations, notamment les femmes et les enfants.
« J’ai exploré la toxicité en examinant comment elle affecte les femmes et les enfants à travers l’engrais, les radiations et la pollution minière. Sur le terrain, j’ai pu constater à quel point les habitants subissent ces effets. Dans certains quartiers, les habitants semblent ne plus avoir une peau normale », a témoigné l’artiste.
Jenny a également visité les cliniques universitaires de Lubumbashi, où elle a observé un grand nombre d’enfants atteints de cancer, souvent liés à une exposition prolongée à l’exploitation minière.
La toxicité, définie comme la capacité d'une substance à nuire à un organisme vivant, peut causer divers effets, allant d’irritations mineures à des maladies graves, en fonction de la dose et de la voie d’exposition.
Un projet artistique entre art et science
La Biennale de Lubumbashi, qui se déroule dans le chef-lieu de la province du Haut-Katanga, adopte une démarche alliant art et science. Des ateliers, conférences et échanges animent cette huitième édition, avec la participation d’artistes venus de Kinshasa, Goma, Kisangani, du Katanga et de l’international, qui présentent des œuvres explorant des thèmes sociaux et environnementaux.
Jenny Munyongamayi, fidèle à son engagement artistique inspiré par les réalités sociales, espère continuer à utiliser le slam pour sensibiliser le public à des problématiques cruciales. « Si quelque chose mérite que ma plume coule, alors je la laisse couler », a-t-elle déclaré, partageant également que ses moments d’inspiration viennent souvent pendant qu’elle effectue des tâches ménagères.
Kuzamba Mbuangu