Les fortes pluies du 4 et 5 avril ont plongé Kinshasa dans le chaos en provoquant une inondation exceptionnelle de la rivière Ndjili qui traverse 4 des 24 communes de la capitale congolaise. Le gouvernement fait état de plus de 70 morts, 150 blessés et de lourds dégâts matériels. 21 606 ménages ont été également affectés dans plusieurs quartiers de la capitale.
Ce débordement exceptionnel s'explique scientifiquement par trois grands phénomènes climatiques selon le professeur Jean Robert Bwangoy Bankanza Bolambee.
Pour climatologue, le monde est passé d'un épisode El Nino à l'épisode la Nina. Ces deux facteurs amènent des pluies accompagnées de précipitations dans le Bassin du Congo notamment en RDC afin de donner lieu à la saison de pluie.
La situation s'est aggravée encore une fois par le fait que la Nina qui est en train de passer s'est combiné la zone de convergence intertropicale.
“Nous sommes passés d’un épisode climatique El Niño à l’épisode La Niña. Les deux phénomènes amènent des précipitations très abondantes dans la partie Ouest du bassin du Congo. Cette fois-ci le phénomène Nina est combiné avec la zone de convergence intertropicale qui va du Nigéria jusqu’en Zambie. C’est ce qui nous donne la pluie en septembre, octobre et novembre (la grande saison de pluie) et il remonte en février pour nous laisser la pluie fin mars, avril et mai”, explique ce professeur de l'Université de Kinshasa et Chercheur à l'Université de Dagota du Sud, aux USA.
“ Nous avons constaté qu’il y a une déportation d’une masse froide vers les côtes de l’Indonésie. Généralement, lorsqu’il y a ce phénomène, à cause de la télé connexion entre les trois bassins, les eaux de l’Amazonie sont déportées vers le bassin du Congo. Or, le Bassin du Congo est un bassin sec de tous les trois bassins. Il n’est pas équipé pour recevoir un excès”.
Au-delà de ces deux aspects, Professeur Jean-Robert cite également la situation pluvio-orageuse qui s'est déréglée dans le Kongo Central qui a fait déborder les eaux du bassin de la rivière N'djili.
“ Le troisième élément le plus important est que la situation pluvio-orageuse s’est développée dans le Kongo Central. Il y a une lame d’eau qui est excessivement importante vers Kinshasa et le déplacement de la masse d’air entre le district de la Lukaya et la ville de Kinshasa s’est fait relativement moins vite. Nous avons une hypothèse : la zone de conversion était très vaste. Elle va de Kinshasa au district de la Lukaya. Le déplacement de masse d’air était très lent et la zone de conversion très vaste. Voilà pourquoi, il a d’abord plu au Kongo Central, c’est qui est normal parce que la zone de conversion venait du sud, et ensuite il a plu à Kinshasa abondamment à Kinshasa pendant qu’il continuait à pleuvoir au Kongo Central. La rivière N’djili est la seule dont le bassin est orienté nord-sud. Elle collecte les eaux de la rivière Lukaya qui, à son tour, collecte les eaux de tout le district. Et donc, comme les eaux de la Lukaya sont venues se déverser alors qu’il continuait de pleuvoir à Kinshasa, c’est ainsi que la situation qui s’est passé à Ndjili est exceptionnelle", a-t-il poursuivi.
La végétation forestière protège la rivière N’sele
Dans la ville de Kinshasa, seules les rivières N'djili et N'sele accueillent les eaux venant de la province du Kongo Central. Mais à la différence de N'djili, la rivière N'sele est protégée d'une certaine manière par la végétation forestière qui amortit la vitesse des eaux et diminue l'impact des grosses inondations.
“Cette fois-ci vous avez vu que Makelele n’a pas eu la même intensité des eaux de pluie que Ndjili. Makelele ne reçoit plus les eaux du Kongo Central. Sa source se trouve à Binza et ne prend que les eaux de pluies qui tombent localement. Ce sont seulement les rivières N’djili et N’sele qui reçoivent les eaux du Kongo Central. La différence entre les deux est que la rivière Lukunga qui amène les eaux du Kongo Central dans la rivière N'sele est généralement couverte de végétation forestière. Elle retarde et amortit le flot de l’eau. C’est ce qui a fait que dans le bassin de la rivière N’sele on n’a pas reçu toutes les eaux au même moment”, a expliqué Professeur Jean Robert Bwangoy Bankanza Bolambee.
Par ailleurs, bien que l'urbanisation et une mauvaise politique de gestion de déchets durs soient parmi les causes de l'inondation, l'expert en climat estime que leur chance reste minime pour ramener les eaux de la rivière N'djili à ce niveau exceptionnel.
Selon lui, la première mesure à prendre face à cette situation c'est de déloger tous les habitants le long du lit de la rivière N'djili. Ensuite, il faut des travaux de curage de la rivière. De plus, il faut une bonne politique de gestion de déchets qui implique la base, c'est-à-dire, la population qui est le dernier usager.