Nord-Kivu : selon l’armée, « la condamnation à perpétuité de deux officiers qui se sont battus devra servir de leçon à tous les militaires »

Lors du prononcé du procès opposant le ministère public aux deux officiers de l’armée à Goma, mardi 10 août 2021, le premier président de la Cour militaire du Nord-Kivu, le Colonel Kabeya Ya Hanu Ben, a expliqué pourquoi la prévention de violation des consignes a été retenue à charge des prévenus. En se livrant au spectacle de combat le mardi 3 août dernier à l’aéroport international de Goma, les deux officiers ont violé l'article 13 point 4 de la loi N°13/005 du 16 janvier 2013 portant statut des militaires qui dispose, « le militaire doit en tout temps et en tout lieu, respecter les institutions de la République, s'abstenir de toute activité contraire à la constitution et aux lois de la République, veiller à la sauvegarde des intérêts de la nation et éviter de compromettre l'honneur, la dignité de son état de sa profession ».

Ils se sont également compromis en agissant contre l’alinéa premier de l'article 19 de la même loi qui dispose « le militaire est tenu à la stricte correction dans ses rapports avec ses supérieurs, ses collègues et ses subordonnés ».

Pour le premier président de la Cour, la loi précitée ne prévoyant pas la peine à ces deux articles, les deux officiers ont donc agi en violation des consignes.

« La Cour dit que l'acte posé constitue la violation des consignes à l'égard et du major, et du capitaine, par le fait de se livrer à des échanges des coups en public en violation de l'article 13 point 4 de la loi N°13/005 du 16 janvier 2013 portant statut des militaires (…).  Le fait pour le major et pour le capitaine de se livrer à une bagarre ouverte s'offrant ainsi à un spectacle au public, cela porte atteinte au point 4 de la loi portant statut du militaire. Ayant ainsi agi, les prévenu major Rimenze et le capitaine Muzito n'ont pas seulement porté atteinte à la dignité et à l'état de leur profession mais aussi jeté l'opprobre sur les Forces armées de la République démocratique du Congo ainsi  qu'à la police nationale congolaise. Et cela constitue la violation des consignes qui sont établies », a dit le Colonel Kabeya Ya Hanu Ben.

Le major Rimenze Bisimwa et le capitaine Mukando Muzito ont écopé tous deux de la servitude pénale à perpétuité pour violation des consignes pendant l’état siège.

Le porte parole de la 34e région militaire, le major Njike Kaiko Guillaume, affirme que cette condamnation constitue une leçon à tous les militaires engagés aux fronts en cette période exceptionnelle.

« C'est un arrêt qui a un caractère pédagogique et dissuasif parce que vous êtes sans oublié que nous sommes dans un état de siège décrété par le commandant suprême et les premiers animateurs de cet état de siège sont les militaires et les policiers. A ce titre, ces derniers doivent avoir un comportement exemplaire. Cela pourra permettre aux officiers et aux hommes de troupe, surtout pendant cette période d'avoir un comportement exemplaire » a dit le major Njike Kaiko Guillaume, porte parole de la 34e région militaire.

Tout en promettant d'interjeter appel pour insuffisance de la motivation du jugement, Me Ruffin Lukoo, un des conseils du major Rimenze a estimé tout de même que le juge a dit le droit.

« On a déclaré l'état de siège ici pour que tout dépende des militaires pour donner des solutions à ce que les autorités politico-administratives civiles n'ont pas pu pendant plus de 10 ans. Donc, la justice militaire a encore une fois honoré notre jurisprudence nationale de sa rigueur, de sa rigidité en ce qui concerne l’arrêt qu'ils ont prononcé. La justice militaire congolaise siégeant au Nord-Kivu a fait son travail. Ça doit donner des leçons à tous les militaires qui sont au front pour dire qu'on ne porte pas de coups en tant que militaire. On ne viole pas la discipline, l'honneur et surtout la hiérarchie. Un militaire ne peut pas désobéir parce que celui qui a désobéi a été condamné », a réagi Me Ruffin Lukoo.

Les deux officiers sont arrivés à s’échanger des coups lorsque le capitaine a refusé d’exécuter l'ordre de son chef de ne pas décharger des munitions d'un véhicule qui était sollicité pour un autre service.

Jonathan Kombi, à Goma