"Ces familles ont tout perdu et ont besoin de soutien, mais plus que tout, elles ont besoin de paix" (Joseph Sagara, coordinateur du projet d’urgence pour MSF à Goma)

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L’est de la République Démocratique du Congo continue de faire face à une crise humanitaire sans précédent. Alors que des milliers de personnes sont forcées de fuir leurs foyers à cause des violences armées, Médecins Sans Frontières (MSF) met en place des interventions d'urgence pour répondre aux besoins croissants en soins médicaux. Joseph Sagara, coordinateur de projet d’urgence pour MSF à Goma, a livré ce 04 Janvier un témoignage de terrain sur les défis rencontrés dans la gestion et la prise en charge des déplacés internes, en particulier des femmes et des enfants, souvent les plus vulnérables.


Joseph Sagara revient sur les dernières semaines passées à l’hôpital de Kyeshero, un centre de soins où MSF a dû intensifier son intervention pour faire face à un afflux massif de blessés.
"En une semaine d’intervention à l’hôpital de Kyeshero, nous avons admis plus de 400 blessés, dont 60 % sont des civils. Parmi ces blessés, environ 10 à 15 % sont des enfants de moins de 15 ans, et 20 % des femmes", raconte Joseph Sagara. "En termes de complications graves, environ 4 % des cas étaient des "cas rouges", nécessitant des interventions chirurgicales urgentes. Nous avons enregistré une centaine de passages au bloc opératoire, cinq laparotomies et cinq amputations d’orteils et de doigts. Malheureusement, nous avons aussi déploré trois décès, et deux corps sont arrivés sans vie à l’hôpital."
Les blessures varient, allant des éclats d'obus aux balles, ce qui complique la gestion des soins. "Nous traitons des blessures par armes à feu, des blessures par éclats d’obus, ainsi que des blessures avec des corps étrangers dans le corps. Ce sont des situations très complexes qui demandent des compétences spécialisées et une gestion rigoureuse", poursuit-il.

La situation logistique est également un défi majeur pour MSF sur le terrain. Après avoir récupéré quelques médicaments de leur base de vie pour faire face aux premiers besoins, l’équipe de MSF à Kyeshero a dû faire face à une situation désastreuse : le pillage de leur stock principal.
 

"Nous avons d'abord réussi à nous procurer quelques médicaments pour répondre aux besoins urgents, mais malheureusement, notre stock principal a été pillé. Nous faisons des appels à d’autres sections pour nous soutenir, et nous avons partagé les besoins en termes de médicaments, en espérant que d’autres équipes puissent nous aider. Mais nous devons réfléchir à un plan pour ravitailler notre stock, car nous risquons une rupture dans les jours à venir", explique Joseph Sagara.

L’une des grandes préoccupations est la possibilité de l’acheminement de renforts, notamment en raison de la fermeture de l’aéroport local. " Nous réfléchissons à d’autres voies pour faire parvenir de l’aide, mais la situation reste compliquée."
En dehors des soins aux blessés, une autre préoccupation majeure concerne les centaines de milliers de déplacés internes, qui vivent dans des conditions de plus en plus précaires dans les camps. 

Les enfants et les femmes, qui représentent une grande partie de la population déplacée, sont particulièrement vulnérables. L’accès limité aux soins de santé, à l’éducation et à la sécurité rend leur situation encore plus désastreuse.
" Il est urgent que ces personnes puissent rentrer chez elles, mais tant qu’il n’y a pas de paix, elles ne pourront pas le faire. Notre appel est simple : nous demandons un cessez-le-feu pour que ces familles puissent retourner chez elles et reprendre leur vie. Nous appelons également la communauté internationale à se mobiliser pour soutenir les efforts humanitaires dans cette région", conclut Joseph Sagara.


Nancy Clémence Tshimueneka