Législatives nationales au Nord-Kivu : Pour la première fois, Butembo vote pour une femme

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Les électeurs consultent les résultats devant un bureau de vote à Bukavu

Au Nord-Kivu, sur la quarantaine de députés nationaux attendus, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a publié la liste provisoire des 32 députés élus dans les circonscriptions de Beni-territoire (8), Beni-ville (2), Butembo (4), Lubero (9), Nyiragongo (2), Goma (4) et Walikale (3). Deux circonscriptions, Rutshuru et Masisi, actuellement assiégées par les rebelles du M23, pourront voter une fois que l'autorité de l'État sera rétablie. Bien que provisoires en attendant leur confirmation par la Cour constitutionnelle, ces résultats révèlent plusieurs réalités.

Pour la première fois, une femme élue à Butembo

Depuis 2006, c'est la première fois qu'une femme est élue députée nationale en ville de Butembo. Il s'agit de Jeanine Katasohire, cadre du Bloc uni pour la renaissance et l'émergence du Congo (BUREC), parti cher à Julien Paluku. Fille d'un homme d'affaires prospère de Butembo ayant fait fortune dans la savonnerie (Saîbu), Jeanine Katasohire avait exercé durant la législature passée comme députée nationale suppléante de Carly Nzanzu Kasivita, qui lui avait laissé son siège pour devenir gouverneur du Nord-Kivu. Cependant, Nzanzu Kasivita n'a pas occupé le poste comme prévu, se retirant en moins de deux ans et cédant son fauteuil aux militaires affectés dans le cadre de l'état de siège. Sollicitée par l'électorat, Jeanine Katasohire s'est portée candidate en ville de Butembo, où son parti et sa famille ont une influence. Timide, à la démarche calme, elle s'est investie dans des œuvres caritatives et a soutenu l'entrepreneuriat féminin en octroyant des prêts sans intérêts aux petits entrepreneurs. Cette action a contribué à sa renommée dans les quatre communes de la ville, la conduisant à être élue aux côtés de trois hommes influents : Remyxon Mukweso de l'AVRP de Nzangi Muhindo, Antipas Mbusa Nyamwisi du RCD-KML et Mbindule Mitono de l'UDPS.

Outre l'élection de Jeanine Katasohire, deux femmes se démarquent également comme les meilleures perdantes jusqu'à présent : la ministre Catherine Furaha de l'UNC de Vital Kamerhe et la militante Rose Tuombeane de l'AFDC de Bahati Lukwebo.

Muhindo Kasondoli, enseignant au département de genre de la Faculté de science politique de l'Université officielle de Rwenzori (UOR-Butembo), souligne l'avancée significative de la présence de trois femmes parmi les six premiers candidats à la députation dans une ville disposant de quatre sièges. Il explique cette progression par trois facteurs principaux. Premièrement, les femmes ont adapté leurs stratégies de campagne en créant des structures d'appui permanentes pour canaliser leurs actions. Selon lui, les femmes ont désormais des mécanismes de montage et de gestion de ces structures, ce qui facilite leur passage dans le paysage politique. Deuxièmement, la population exprime une volonté de mettre fin au règne d'une junte masculine aux stratèges mensongers et démagogiques. Enfin, l'appartenance de ces femmes à des partis influents de l'Union sacrée, bien consommée dans l'opinion, a également joué un rôle déterminant.

Les résultats actuels sont provisoires, en attente de confirmation par la Cour constitutionnelle. En cas de validation, Jeanine Katasohire devra relever le défi de faire reconnaître son travail aux côtés d'hommes expérimentés. Les élections ont également marqué une avancée significative pour la représentation des femmes en politique dans la région.

Claude Sengenya