« Il ne peut pas aller plus loin. Il a même peur de se rendre à Bukavu. Avant de se lancer dans ce projet, il faut tâter le terrain », confie à ACTUALITE.CD un candidat à la présidentielle se déclarant membre de l’opposition. Le lancement timide de la campagne de Denis Mukwege, qui contrastait avec l’activité de Moïse Katumbi, de Félix Tshisekedi ou encore de Martin Fayulu, a semé quelque peu le doute dans certains esprits.
« Il n’est rien. Il va même regretter de s’être dévoilé. Il aurait dû continuer à soutenir l’opposition sans entrer dans l'arène », commente pour sa part un proche de Félix Tshisekedi.
Il est peu dire que le meeting de Denis Mukwege à Bukavu, son fief naturel, ce samedi, était attendu. Premier test : la mobilisation. La foule a répondu présente. Ce n’était pas « wow », mais plus que respectable pour un novice en politique.
Arborant l’air sérieux d’un chirurgien sorti du bloc opératoire, le Docteur Mukwege ne joue pas les séducteurs. Vêtu de blanc, il se présente devant la foule rassemblée pour l’écouter, déterminé. Il se sait attendu, mais il ne compte pas jouer en solo. Médecin de renom et pasteur respecté, il se montre d’abord comme un « homme responsable ». Faisant son entrée sous les applaudissements, il présente Madeleine, son épouse, puis énumère les noms des candidats de son regroupement politique, annonçant leurs positions respectives.
Pendant une vingtaine de minutes, il expose l’origine de son combat, revenant sur le début des massacres dans l’Est de la RDC. « On pensait que ce n’était qu’une parenthèse, mais nous avions tort », dit-il. Il explique également son engagement mondial pour défendre les victimes des conflits dans cette région, soulignant : « J’ai fait tout ce que je pouvais. J’ai demandé justice pour toutes les victimes. Nous avons même engagé des avocats pour réclamer justice. Je suis allé jusqu'au sommet. On m’a dit que j’appartenais à la société civile et que je n’avais pas le droit de formuler ces demandes au conseil de sécurité. Pour être habilité à demander cela au conseil de sécurité, il faut être président de son pays ».
Il explique que même son statut d’activiste et de Prix Nobel de la Paix n’a pas suffi à stopper les massacres. « Quand je serai élu, la première chose que je dirai au conseil de sécurité sera de réclamer justice », affirme-t-il devant la foule venue l’écouter.
Mukwege se montre pédagogue face à la population, se présentant comme un homme en mission : « Je ne suis pas ici pour faire une carrière politique. Je ne le peux pas. Cependant, j’ai une seule mission ».
Durant près d'une heure, il insiste sur la lutte contre les diverses formes de violences, axant ses priorités sur trois axes : « Donnez-moi cette opportunité pour mettre fin à la guerre, à la famine, et aux antivaleurs ». Et il ajoute : « Mon projet de société est concis (...) Tous les jeunes que vous voyez ont des diplômes, mais ils ne trouvent pas de travail. La guerre a tout détruit. La violence en est la racine. Ce que je ferai une fois élu, c’est structurer et moderniser notre armée ».
Alors que certains estiment qu’il pourrait se retirer en faveur d’un autre candidat, l’homme est en campagne et compte sur la population pour contredire tous les pronostics : « Nous allons gagner. Si vous votez mal, nous resterons des esclaves. Mais si vous votez bien, le Congo sera au-dessus ».