La RDC court le risque de voir le marché noir des produits du tabac exploser. C'est l'une des conséquences directes qui pourrait découler d’une pression fiscale excessive exercée sur la filière du tabac au pays. En République démocratique du Congo, le budget, exercice 2025, a introduit une hausse exorbitante de la fiscalité autour des produits du tabac, faisant passer le taux d’accise ad valorem de 60 à 100 %, avec une surtaxe additionnelle de 20% en droit d’accise spécial. Cette hausse subite fait des produits du tabac, les plus lourdement taxés parmi les biens soumis aux droits d’accise au Congo.
En République démocratique du Congo, après plus ou moins un siècle de présence, British American Tobbaco (BAT) a mis fins à ses activités à cause de cette pression fiscale exponentielle.
Généralement, pour contrôler le tabagisme et réduire la consommation des cigarettes, surtout chez les jeunes, des gouvernements recourent au levier de la fiscalité. Une étude de l’Organisation mondiale de la santé, menée dans 16 pays montre que des taxes plus élevées contraignent les jeunes fumeurs à arrêter ou à réduire leur consommation. S'appuyant sur des décennies de preuves, l'Organisation mondiale de la santé considère les taxes sur le tabac comme l'une des mesures les plus efficaces et les plus économiques pour réduire le tabagisme.
Mais une fiscalité excessive sur les produits du tabac peut aussi avoir un effet dangereux : trop taxer ces produits induit la rareté des substances qui respectent les procédures de fabrications et du circuit de contrôle, ce qui pousse les consommateurs à recourir aux produits de la contrebande, qui ne sont pas du tout contrôlés, souvent très nocifs.
De fil en aiguille, aussi longtemps que la contrebande prospère, des réseaux criminels se greffent autour de ces activités illicites et organisent bien d’autres trafics, encore pire, comme le trafic d’armes. Selon l’Organized crime and corruption reporting project (OCCRP), « l’industrie du tabac alimente massivement et délibérément la contrebande de tabac en Afrique de l’Ouest, alors même que celle-ci finance la militarisation de la criminalité organisée, les milices ethniques et les terroristes islamistes ».
La République démocratique du Congo, classée au quatrième rang africain des pays ayant plus des fumeurs, 5.8 millions des fumeurs (en 2022) selon l’OMS, est exposée au développement des réseaux illicites des cigarettes. Le danger est d’autant plus grand que le pays connait une démographie galopante, ce qui fera forcément augmenter le nombre des consommateurs des cigarettes. L’augmentation excessives des taxes a poussé certains cigarettiers à recourir à des pratiques illicites, comme la falsification des vignettes. La douane Congolaise a frappé de pénalités ces entreprises, qui à leur tour, ont contourné les mesures de la douane en créant des sociétés écrans qui importent sous d’autres noms. La filière du tabac serait donc coutumière de ces recours systématiques aux réseaux parallèles quasiment partout dans le monde. En France par exemple, le comité national contre le tabagisme CNCT, a prouvé qu’il existe des liens étroits entre l’industrie du tabac et les réseaux criminels et terroristes. Des investigations de l’OCCRP ont montré que des cigarettiers respectés comme "Philip Morris International, Imperial Brands et British American Tobacco sont impliqués dans le trafic transnational de tabac en Afrique. Les trois compagnies de tabac sont accusées de sur-approvisionner délibérément les marchés locaux en Afrique, sachant qu’une large majorité du tabac finira dans les réseaux de la contrebande, contribuant au financement de la criminalité organisée, des milices armées et des organisations djihadistes".
L'expérience a démontré qu'il est plus simple pour les pouvoirs publics d'empêcher en amont l'établissement des réseaux criminels que les démanteler une fois qu'ils se sont constitués. Car les réseaux du marché noir se constituent parfois de l'étranger, se tissent en interne aussi, et deviennent difficiles à intercepter. Les services de douanes et de contrôle peuvent effectuer des coups de filet, un réseau qui s'est constitué, tente toujours à renaître après son démantèlement.