Depuis la résurgence du conflit dans l'Est de la République Démocratique du Congo, les conditions de vie des femmes se sont considérablement dégradées. Les violences physiques et psychologiques, ainsi que la destruction des structures sociales et économiques, frappent les femmes, déjà durement affectées par les précédentes crises.
Une ONG locale de défense des droits des femmes, active depuis plusieurs années dans le Sud-Kivu, a accepté de témoigner de l’ampleur de la tragédie, tout en gardant l’anonymat pour des raisons de sécurité. Cette organisation tire la sonnette d'alarme face à la gravité de la situation :
"Les viols collectifs et les violences sexuelles font partie intégrante des stratégies de guerre utilisées par les groupes armés dans la région. Ces actes terrorisent les populations et détruisent tout espoir de reconstruction après le conflit. Les femmes sont particulièrement visées, non seulement en raison de leur sexe, mais aussi pour leur rôle central dans la gestion du foyer. Le viol est ainsi devenu une arme de guerre", témoigne la coordinatrice de l'ONG.
Elle ajoute que l’association a documenté de nombreux cas où des femmes et des filles ont été capturées, violées, puis abandonnées dans des conditions inhumaines, souvent laissées pour mortes.
"Les victimes de ces violences subissent non seulement des séquelles physiques, mais aussi des traumatismes psychologiques lourds, ce qui les marginalise encore davantage. Beaucoup d’entre elles sont rejetées par leur propre communauté après ces atrocités, ou s'auto-excluent, ne pouvant accepter cette réalité de leur vie", explique-t-elle.
Au-delà des violences physiques, les femmes font face à une situation économique désastreuse.
"Avec la guerre, de nombreuses familles ont perdu leurs moyens de subsistance, ce qui a entraîné une pauvreté accrue. Souvent elles sont les premières à être privées d’accès aux ressources. Les femmes sont contraintes de se battre pour nourrir leurs enfants et subvenir aux besoins de la famille dans un contexte de pénurie généralisée", poursuit-elle. Elle souligne également la détérioration des infrastructures sanitaires, rendant l’accès aux soins plus difficile, en particulier pour les femmes enceintes ou celles ayant des besoins gynécologiques spécifiques. "Les structures de santé sont saturées et les déplacements sont dangereux. Les femmes souhaitant consulter un médecin ou accoucher dans un environnement sécurisé risquent leur vie et celle de leur enfant", déplore-t-elle.
L'ONG se bat chaque jour pour apporter soutien et protection aux femmes victimes de violences et de discriminations, mais les moyens restent insuffisants. "Nous avons mis en place des programmes de soutien psychologique, d’accompagnement juridique et de formation pour aider les femmes à retrouver leur autonomie, mais tout cela nécessite des ressources financières. Nos stocks de médicaments sont épuisés, et sans un corridor humanitaire fonctionnel, il nous est impossible de répondre adéquatement à la demande. Nous ne pouvons plus prendre en charge toutes les victimes de manière efficace. Nous appelons la communauté internationale à intervenir en faveur du rétablissement de la paix dans cette région et à aider ces femmes à reprendre leur vie en main", a-t-elle lancé.
Malgré les conditions extrêmement difficiles, l'ONG persévère dans son engagement. "Notre travail devient encore plus complexe en période de guerre, car la sécurité précaire ne nous permet pas toujours d’atteindre toutes les populations en détresse. Mais nous continuons. Chaque vie que nous sauvons, chaque femme à qui nous redonnons espoir, représente une victoire", a conclu la coordinatrice.
Nancy Clémence Tshimueneka