10 mars 2023 : jour sombre pour la culture nationale, jour sombre pour la musique congolaise moderne... le noir du deuil parce que le pays avait perdu l’un de ses plus talentueux musiciens, guitariste connu et reconnu, Papa Noël Nedule ; le noir de la honte et du désespoir parce que nous l’avons enterré en catimini, presque dans le déshonneur...
Enterré sans tambours ni trompettes à N’Sele-Bambous !
Alors que « la République » s’était inclinée voici quelques jours devant la dépouille d’Edingwe dont le visage avait même recouvert le fronton du palais du Peuple, l’artiste émérite qu’était Papa Noël a été, lui, subrepticement amené, hier 10 mars à la tombée de la nuit, à sa dernière demeure, à l’insu de ses nombreux fans et de ses collègues musiciens, sans un regard ni un mot de reconnaissance des pouvoirs publics, du reste absents de toutes les cérémonies étriquées et écourtées que la famille a réservé à ce monument national. Le comble c’est que c’est encore une histoire d’argent ! On sait que les obsèques des artistes sont devenues des occasions toutes trouvées pour se faire de l’argent facile, quel que soit le côté où l’on se retrouve...
En un mot comme en dix, Antoine-Noël Nedule dit Papa Noël a été inhumé hier, à la tombée de la nuit, sans fanfare ni trompette, parce que les pouvoirs publics avaient jugé bon de se déresponsabiliser et parce que la famille s’entredéchirait autour de l’argent donné pour les obsèques. Triste pour la musique congolaise, couac pour la culture et les arts, honteux et scandaleux si l’on considère la stature de Papa Noël...
Auteur de quelques « classiques » de la Rumba congolaise
Né le 25 décembre 1940 à Kinshasa, il est mort en France le 11 novembre 2024 et le rapatriement de la dépouille de Papa Noël avait déjà été problématique.
Avec Papa Jeannot Bombenga Wewando, Papa Noël était l’une de ces rares icônes de la Rumba congolaise encore vivantes. Son talent l’a conduit à se distinguer aussi bien auprès des tenants de la rumba fiesta que de ceux de la rumba odemba puisqu’il a évolué et brillé aussi bien avec l’African Jazz, le Bantou de capitale qu’avec l’OK Jazz où on ne compte pas ses tubes (« Bon samaritain », « Madiabuana », « Selia Zozo », « Bel ami », « Kizunguzungu », « Tangawusi », pour ne citer que ces chansons-là), sans oublier tous les répertoires dans lesquels, de Brazzaville à Kinshasa, il a fait la démonstration de son génie.
Rendre hommage aux icônes authentiques de notre culture
Papa Noël dont la voix mais surtout le doigté à la guitare ont fait danser et feront encore danser des générations de mélomanes est parti sur la pointe des pieds, le 11 novembre 2024 et est retourné à la terre de ses ancêtres au crépuscule de ce 10 mars 2025, lui qui, plus que d’autres, avait droit à nos hommages. Le patriarche et artiste émérite Jeannot Bombenga Wewando avait tellement raison de s’en prendre à ceux qui auraient dû veiller à ce qu’un hommage soit véritablement rendu à ce grand artiste, Papa Noël.
Ce que les artistes et les gens de culture demandent, c’est que les responsables à différents niveaux sachent vraiment faire la différence entre les marionnettes médiatiques ou médiatisées et les icônes authentiques de la culture de notre pays. Malheureusement, ce n’est presque jamais le cas, hier comme aujourd’hui, à cause de la cupidité et de l’incompétence ambiantes. Triste et honteux pour le géant culturel qu’est la République Démocratique du Congo !
Kukupemba Dieu-Veille