Pour ce quatrième cycle électoral, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a pu organiser simultanément quatre types de scrutins différents : la présidentielle, les législatives nationales, les législatives provinciales et les élections municipales. Pour ces quatre types de scrutins, la Centrale électorale a enregistré près de 100 000 candidatures après les décisions judiciaires.
Ces chiffres élevés qui, selon plusieurs analystes, pourraient rivaliser avec ceux de l'électorat d'autres villes voire pays en Afrique, suscitent des réactions dans l'environnement sociopolitique. Le président du conseil d’administration de l’Observatoire des dépenses publiques (ODEP), Florimont Muteba, affirme que ces chiffres ne sont pas synonymes d'une avancée démocratique, mais plutôt d’un signe de défaillance dans la gouvernance en RDC.
« Il ne s'agit pas du tout de personnes aspirant à la fonction publique, mais plutôt de personnes en quête d'emploi. Dans un pays où le développement avance, où l'on peut créer son entreprise, où l'État peut impulser l'emploi grâce à des politiques publiques adéquates, les Congolais ne devraient pas être confrontés à cette situation. Regardez les Libanais et autres qui viennent chez nous, ils sont riches, mais comment font-ils leur argent ? Au Congo. Pourquoi les Congolais ne peuvent-ils pas prospérer chez eux ? Au lieu d'aller courir derrière un poste, bien que 21 000 USD pour un député puisse sembler excessif, cela découle de notre statut de pays pauvre, où le développement a été stagnant ces cinq dernières années. Quel est le bilan de ces cinq dernières années ? Quelques bâtiments érigés ici et là ? Même lorsqu'on évoque un taux de croissance, ce taux est-il inclusif ? Il provient de quel secteur, hormis les mines ? Dans cette grande pauvreté, les gens voient ces salaires mirifiques perçus par nos députés et dirigeants et se disent que même eux peuvent accéder à cette aubaine. Ces 100 000 candidats pour quelques postes de travail sont au chômage et veulent également participer à cette gabegie financière », a-t-il expliqué lors de son intervention à l'émission "Transparence" d'ACTUALITE.CD le jeudi 28 décembre.
Pour cet acteur de la société civile spécialisé dans les questions économiques et financières, cette situation est encouragée par les dirigeants du pays qui ne veulent pas faire de la réduction du train de vie des institutions une priorité dans la gouvernance.
« Est-ce acceptable ? Les dirigeants du pays ne sont pas disposés à aborder cette question. Au contraire, ils l'encouragent. Par exemple, lors d'une récente émission sur Top Congo, lorsque le président de la République a été interrogé sur les salaires, sa réaction était éloquente. Pour lui, ce n'est rien, cela ne le concerne pas, comme il l'a affirmé. Il est même incapable de fournir des informations sur son propre salaire cinq ans après son accession au pouvoir. Cette négligence à l'égard de ce que l'on peut appeler la justice distributive est flagrante. Comment peut-on accorder 21 000 USD à un député sans prendre en compte les autres aspects ? Comment peut-on payer un policier 80 USD, un enseignant seulement 400 000 FC ? Quelle valeur cela a-t-il aujourd'hui ? Ces responsables gouvernementaux ne sont pas socialement engagés », a-t-il regretté au cours de son intervention.
Depuis l'adoption de la nouvelle constitution, la RDC vient de mener à bien son quatrième cycle électoral. Malgré les doutes qui planaient depuis plusieurs mois sur la tenue des scrutins, la CENI a tenu à respecter son calendrier, malgré les défis logistiques et financiers. La CENI a pu bénéficier "in extremis" du soutien logistique des Forces armées égyptiennes et des FARDC, en plus de l'importante aide de la Monusco, permettant ainsi l'acheminement des kits dans les zones difficilement accessibles à travers le pays.
Après le vote, la CENI envisage de proclamer les résultats provisoires de la présidentielle d'ici le 31 décembre. Ensuite, débutera l'étape du contentieux électoral devant la Cour constitutionnelle, qui devra confirmer ou infirmer les résultats publiés par la centrale électorale. Le nouveau Président de la République prêtera serment le 20 janvier 2024, selon le calendrier de la CENI.
Clément MUAMBA