Guerre de l’AFC/M23: après la décision politique, l'UE prépare la liste des sanctions individuelles contre le Rwanda

Les rebelles du M23 à Goma
Les rebelles du M23 à Goma

La pression internationale se fait de plus en plus sentir sur le Rwanda pour son soutien à la rébellion de l’AFC/M23 dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Après la décision politique suspendant les consultations avec le Rwanda sur les questions de défense, l'Union Européenne ne compte pas s'arrêter et tient à contraindre Kigali à arrêter son soutien à la rébellion du M23 et à faire respecter l'intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo.

À l'issue de sa mission à Kigali et à Kinshasa, le représentant spécial de l’Union européenne pour la région des Grands Lacs, Johan Borgstam a révélé que l’UE est en train d'examiner les possibilités d'infliger des sanctions individuelles à l'endroit des autorités rwandaises.

"La question des sanctions à titre individuel, ce qu'on a fait le 24 février jour de la réunion du Conseil c’est qu'on a pris une décision politique de continuer les préparations pour établir une liste de certains individus et maintenant ce sont nos collègues juridiques légaux au siège qui s'en occupent avec les préparations, donc, on entre dans le détail", a déclaré ce mercredi 5 mars 2025 à Kinshasa devant la presse, le diplomate européen Johan Borgstam.

À en croire l’Ambassadeur de l'Union Européenne en RDC, Nicolás Berlanga-Martinez, contrairement aux sanctions de l'ONU ou des USA, celles des européennes suivent un processus juridique avant leur adoption et application.

"Les sanctions européennes contrairement aux sanctions des Nations-Unies ou sanctions américaines sont sous surveillance juridique du Tribunal de Justice de l'Union européenne. Donc, après la décision politique, il y a une période donnée de deux ou trois semaines où il y a un screaming, un triage juridique pour vérifier que les évidences retenues sur la table sur certains individus sont vraiment conformes au droit européen, on est dans cette période là", a expliqué l'ambassadeur de l'UE en RDC.

Comme annoncé par Kaja Kallas, haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et de la politique de sécurité, vice-présidente de la Commission européenne, à l'issue d'une réunion du Conseil des affaires étrangères, le réexamen du mémorandum d'entente avec le Rwanda concernant les matières premières critiques est en cours au niveau du département juridique de l'Union européenne.

"Par rapport à l'accord, “memorandum of understanding” sur les minerais critiques, après cette réunion du Conseil des ministres des Affaires Étrangères Européens du 24 février vous avez sans doute remarqué que la Haute Représentante Madame Kallas a fait une référence particulière à cet accord d'entente et actuellement les discussions continuent au sein de l'Union européenne et ici on entre aussi dans le domaine juridique parce que cet accord d'entente c'est la compétence de la commission Européenne elle-même. Donc, ce n'est pas un dossier où on prend un vote parmi les 27 (NDLR: Ministres des Affaires Étrangères UE), mais la commission a bien retenu, bien compris les questions, le criticisme évoqué par un certain nombre des États membres de l'Union européenne", a expliqué le représentant spécial de l’Union européenne (UE) pour la région des Grands Lacs.

Les décisions de l'Union européenne faisaient suite à  l'adoption par le Parlement européen d'une résolution appelant le Conseil et la Commission des 27 ministres des Affaires Étrangères de l'UE à suspendre immédiatement le mémorandum d’entente conclu entre l’Union européenne et le Rwanda sur les chaînes de valeur des matières premières durables, signé le 19 février 2024.

Dans leur résolution, les députés européens ont également demandé “à la Commission, aux États membres de l'UE et aux institutions financières internationales de geler l'aide budgétaire directe au Rwanda”, soutenant que la Commission et les pays de l'Union européenne “devraient également cesser leur assistance militaire et sécuritaire aux forces armées rwandaises pour éviter de contribuer directement ou indirectement à des opérations militaires abusives dans l'est de la RDC”.

Si l'UE inflige des sanctions individuelles aux acteurs rwandais, elle va également rejoindre les États-Unis d'Amérique qui avaient déjà donné le ton. Il y a quelques semaines, les Etats-Unis ont annoncé des sanctions financières contre le ministre de l’intégration régionale rwandais, James Kabarebe, accusé d’« orchestrer le soutien » du Rwanda au Mouvement du 23 mars (M23) dans l’est de la RDC. James Kabarebe est une « personnalité politique et militaire de premier plan qui a joué un rôle essentiel dans les conflits en RDC ces trois dernières décennies ». À côté de lui, il y avait également le porte-parole du M23 Lawrence Kanyuka qui a été sanctionné.

Clément MUAMBA